LA FOURBURE
Auteur : Marie Delerue, Ifce
Le pied est composé de la phalange distale (ou troisième phalange), entourée de 2 couches imbriquées :
Ces deux couches sont constituées de lamelles accrochées l'une à l'autre, à la manière d'un velcro. Cette imbrication de ces deux couches assure une adhésion entre les structures internes du pied et la paroi du sabot : la phalange distale est ainsi suspendue dans le pied.
Schéma 1 : Structure lamellaire du pied © M. Delerue, Ifce
Lors de fourbure, une inflammation et une perturbation du réseau sanguin du pied provoquent une dégradation de ces lamelles. La phalange distale n'est plus stabilisée par les lamelles et perd sa cohésion avec la paroi dorsale du pied : elle bascule alors vers le bas à la suite de la traction par le tendon fléchisseur profond du doigt. Si les lésions des lamelles sont plus sévères, la 3ème phalange peut descendre dans la boite cornée : on parle d'effondrement. Dans les cas les plus graves, la phalange, qui n'est plus soutenue, perfore la sole. Dans d'autres cas, le cheval peut perdre son sabot.
Schéma 2 : Pied normal : Les parois dorsales du sabot et de la phalange distale sont parallèles © M. Delerue, Ifce
Schéma 3 : Pieds fourbus : Les parois dorsales du sabot et de la phalange distale ne sont plus parallèles. On observe un amincissement de l’épaisseur de la sole en regard de la phalange distale (juste en avant de la fourchette) © M. Delerue, Ifce
La fourbure est toujours la conséquence d'autres maladies. Les causes étant très nombreuses, seules les principales sont évoquées ici.
La fourbure d'origine alimentaire est la plus fréquente. Plus de la moitié des cas de fourbure sont observés lorsque les animaux sont conduits au pâturage. La forte surconsommation de céréales est incriminée dans environ 10% des cas.
Les maladies endocriniennes
L'insulino-résistance, qu'on observe chez les chevaux atteints du syndrome de Cushing et du syndrome métabolique équin (SME), sont des facteurs de risque aggravants pour les équidés. Selon les études, la prévalence de la fourbure peut atteindre entre 50 et 80% des chevaux atteints du syndrome de Cushing.
Syndrome de Cushing © Ifce
Syndrome métabolique équin (SME) © M. Delerue, Ifce
Chevaux d'endurance sur sol dur © Ifce
Les chevaux peuvent également développer une fourbure après une activité physique intense, notamment sur un sol dur : on parle de fourbure d'exercice. Cela concerne plus particulièrement les chevaux d'endurance.
Lors de boiterie importante sur un membre, par exemple dans le cas d'une fracture, le cheval reporte tout son poids sur l'autre antérieur et peut développer une fourbure sur ce pied : on parle de fourbure d'appui. La fourbure est alors unilatérale.
La fourbure peut faire suite à des coliques graves, une diarrhée sévère ou suite à des maladies infectieuses, notamment une métrite post-partum (infection de l'utérus après poulinage), une pneumonie... Des toxines sont libérées et créent des lésions vasculaires dans les pieds. Si un cheval est atteint d'une maladie grave, une surveillance accrue des pieds (pouls digité, chaleur) est très importante.
La fourbure est le plus souvent localisée aux deux antérieurs. Elle peut également concerner les 4 pieds, les postérieurs ou un seul pied.
Les signes cliniques sont évocateurs d'une inflammation et d'une douleur intense dans les pieds. Cette douleur est plus particulièrement localisée en pince, juste en avant de la fourchette.
Ces signes cliniques sont plus ou moins importants selon la gravité de la fourbure. Les ânes exprimant peu la douleur, les signes cliniques peuvent être frustes chez cette espèce.
Un cheval atteint des antérieurs adopte au repos une posture caractéristique : le cheval est campé du devant (ses membres antérieurs sont positionnés en avant de la verticale) et sous-lui derrière (ses membres postérieurs sont en avant de la verticale).
Cette position permet au cheval de soulager sa douleur : il reporte son poids vers les talons. On parle de posture antalgique. Au repos, on peut également observer un piétinement : le cheval reporte son poids d'un pied sur l'autre.
Attention ! Un cheval qui reste couché longtemps peut développer une myosite (coup de sang), des coliques et des escarres.
Autres signes généraux de douleur
Des signes généraux de douleur, non spécifiques de la fourbure, peuvent également être observés :
En cas de doute, deux signes peuvent être observés au niveau des pieds :
Pouls digité © M. Delerue, Ifce
Pouls digité © M. Delerue, Ifce
Les pieds sont chauds © M. Delerue, Ifce
Présence de stries sur le pied d'un cheval en fourbure chronique © M. Delerue, Ifce
La forme chronique prolonge la forme aiguë. On observe parfois une dépression en regard du bourrelet coronaire, qui témoigne de la descente ou de la rotation de la phalange distale. Du fait de la bascule de la phalange distale, le bourrelet coronaire se trouve coincé derrière la paroi du sabot. La croissance de la corne est donc perturbée : elle pousse très vite dans la région des talons alors qu'elle pousse très lentement et de façon anarchique en pince et en mamelle. Une déformation du sabot apparaît alors avec la formation de stries horizontales caractéristiques.
La fourbure est une urgence médicale majeure qui peut aller jusqu'à l'euthanasie du cheval dans les cas les plus graves. Il est donc important d'appeler un vétérinaire immédiatement.
En attendant la venue du vétérinaire, il est conseillé de ne pas déplacer le cheval afin d'éviter l'aggravation des lésions. Plus le cheval a mal, plus il rétracte ses tendons, en particulier le tendon fléchisseur profond du doigt qui tire alors sur la phalange distale et favorise sa bascule.
Si il y a suspicion de fourbure alimentaire, il faut mettre le cheval à la diète, si besoin en lui mettant un panier. Une cryothérapie peut être commencée en attendant la venue du vétérinaire afin de limiter les conséquences de la fourbure (cf ci-dessous). Celle-ci sera d'autant plus efficace qu'elle est mise en place très tôt. Il peut être intéressant lorsque cela est possible de placer le cheval sur une litière très confortable ou sur du sable afin d'améliorer son confort.
Les signes cliniques sont très caractéristiques et orientent rapidement le vétérinaire vers le diagnostic. Le sondage du pied avec une pince exploratrice permet de mettre en évidence une sensibilité en pince.
Un examen radiographique (vues de face et de profil) permet de :
Le phlébogramme permet de visualiser le réseau vasculaire du pied grâce à une radiographie réalisée après injection d'un produit de contraste. Elle est cependant peu utilisée sur le terrain.
La fourbure étant toujours la conséquence d'une autre affection, il faut en premier lieu traiter la cause. Par exemple, un poney obèse en fourbure doit bénéficier d'un régime alimentaire hypocalorique.
Il n'existe pas de traitement miracle pour soigner une fourbure. Le but est à la fois de soulager le cheval et de limiter les conséquence de la fourbure.
Cette technique est très efficace mais nécessite de la main d'œuvre : les poches sont remplies toutes les 2 heures avec des glaçons concassés ou de la glace pilée. Cette technique doit être poursuivie 24 heures après la disparition des symptômes. Il s'agit d'obtenir une température comprise entre -5°c et -7°C, température très bien toléré par le cheval (absence de brûlure par le froid).
Les soins de maréchalerie interviennent une fois que la fourbure a pu être stabilisée mais que des signes d'inconfort persistent. Un examen radiographique préalable est indispensable : une bonne collaboration entre le vétérinaire et le maréchal ferrant est la clé de la réussite dans le traitement de la fourbure. La maréchalerie a pour but d'améliorer le confort du cheval.
Fers en M © J.-M. Goubault, Ifce
© J.-M. Goubault, Ifce
Les maladies endocriniennes doivent être prises en charge, avec l'aide du vétérinaire traitant.
Pour les équidés prédisposés à l'obésité, il est important d'apporter un régime alimentaire hypocalorique adapté. Voici quelques préconisations majeures :